Décembre 2018 – Marrakech
La loi 103.13 promulguée au Maroc, contre les violences faites aux femmes, est entrée en vigueur en septembre 2018. Malgré de vifs débats sur le sujet durant cinq ans, c’est le viol collectif d’une jeune fille qui a ému le pays et qui a fait basculer le pays en faveur d’un changement.
Dans le ménage, la violence physique est nettement plus fréquente que la violence sexuelle. Parmi les femmes qui reçoivent des coups chez elles, 12 % sont aussi abusées sexuellement alors que 50 % des femmes qui ont été violées par un homme qui partage leur logement sont également agressées physiquement. De plus deux femmes sur cinq, victimes de violence sexuelle au sein de leur ménage, ont été également agressées sexuellement en dehors.
Quand les femmes confient l’agression qu’elles ont subie, c’est plus souvent à un proche ou un ami (47 % pour une agression hors ménage, 42 % dans le ménage) ou à un professionnel (19 % dans les deux cas) qu’à la police. Tout se passe comme si elles cherchaient davantage à être comprises et soignées que vengées, ou comme si elles n’avaient pas confiance dans les chances de voir leur agresseur puni.
C’est là, que l’association d’Hayat Simsima entre en jeu pour prévenir, informer et éduquer sur des pratiques qui jusqu’alors étaient admises culturellement.
Hayat Simsima et son association, organisent des manifestations pour promouvoir celle-ci dans les quartiers populaires. Ici, une rencontre entre 21 clubs de foot (un club de fille pour 20 clubs de garçons) qui se sont affrontés sur le terrain; les filles sont sorties victorieuses. Un spectacle de rue a été présenté sur le sujet ; de nombreux jeunes hommes étaient présents et attentifs. L’objectif est de sensibiliser les jeunes garçons au respect des filles, et inversement, les jeunes filles à dire « non » et ne pas accepter des actes de violences considérés comme « culturelles »…

Hayat Simsima utilise le théâtre de rue pour promouvoir la loi contre les violences faites aux femmes. Elle intervient dans tous les quartiers populaires de sa ville et a dû se faire respecter en tant que comédienne.
Ce jour-là, elle se saisit d’une manifestation qui rassemblent de nombreux jeunes autour du ballon rond. Avec la complicité des coaches, elle invite la seule équipe féminine du quartier.
La présence des jeunes garçons est prédominante sur le stade ; ces derniers regardent l’équipe féminine avec amusement.
Soutenues par leur coach, leurs parents, et en particulier leurs mères, ses jeunes filles connaissent parfaitement les enjeux de cette journée. Leur tempérament de battantes, les conduira à affronter les équipes masculine avec dignité, jusqu’au bout.
Beaucoup de détermination dans le regard des ces jeunes footballeuses.
Certaines mamans sont venues soutenir leurs filles sur le terrain. D’une éducation plus traditionnelle, elles aussi connaissent les enjeux de la nouvelle loi pour leurs enfants.
Les filles posent avant de débuter leur premier matches ; le signe de la victoire est déjà mis en avant au-dessus des têtes. Défier les garçons sur leur propre terrain, c’est déjà gagner un peu.
Pendant ce temps, l’association d’Hayat présente un spectacle de rue aux abords du stade. De nombreuses femmes bénévoles arborent un tee-shirt aux couleurs de la cause des femmes.
Hayat interprète une mère de famille à l’éducation traditionnelle, où la violence familiale est tacitement acceptée.
De nombreux jeunes hommes étaient là pour les matches de foot. Les spectacles de rue comme celui-ci, les attirent et ils sont très attentifs à ce qui se joue sur scène. Issus de milieux précaires, ils n’ont guère accès à des distractions de ce type.
La complice de jeu d’Hayat a une tenue vestimentaire plus contemporaine ; c’est elle qui représentera le changement.
Les jeunes femmes sont les plus vulnérables. Hors du ménage, en 2005 ou 2006, une femme sur cinq âgée de 18 à 29 ans a essuyé des injures, une sur dix a subi des caresses et des baisers non désirés et autant des menaces. Pour les délits plus graves, 3,5 % de ces femmes ont subi une agression physique (contre 3 % en moyenne) 2,2 % un viol (contre 0,7 % en moyenne) et 1 % des vols avec violence. la plus grande partie de ces violences sont issue des milieux populaires les plus précaires.
Au cours des deux années, à l’intérieur du foyer, 3,8 % des plus jeunes femmes ont été victimes de violences physiques, contre 3 % en moyenne. Les viols au domicile semblent obéir à une logique différente puisque le pic d’agressions se situe entre 30 et 39 ans et que les jeunes femmes sont un peu moins victimes que leurs aînées.
Fin de journée, l’équipe féminine est en ligne et attend sagement les résultats.
Les filles sortiront victorieuses de cette journée. Hayat (au centre avec le micro), quant à elle, sait très bien que le chemin pour faire évoluer les mentalités sera très long.

Marrakech s’endormira sur la voix de toutes ces femmes qui se battent pour leur reconnaissance.

Combien d’année encore pour que la voix des femmes des milieux plus reculées se fassent entendre ?